jeudi 12 janvier 2017

AEROPORT D'AUCKLAND / Jean Batten terminal : c'est quoi l'avion au plafond ?

Avec les fêtes de fin d'année, les occasions de se rendre au terminal international de l'aéroport d'Auckland se sont enchaînées et à force de patienter dans le hall des arrivées j'ai commencé à m'intéresser aux détails des éléments du décors, en particulier l'avion années 1930 suspendu au plafond avec cette question inscrite au mur pour interpeler les visiteurs :
 "pourquoi y-a-t-il un avion suspendu au plafond ?"

Percival Gull Monoplane de Jean batten - Aéroport Auckland - Arrivées Internationales - ©SM

La réponse ?

On la trouve sur le mur le plus proche de l'avion et la balustrade vitrée située à l'étage d'où l'on peut voir l'antique machine volante d'un peu plus près ... 
Le mur affiche un grand portrait de Jean Batten avec les mentions "1909-1982" et "World-famous New Zealand Aviatrix" (aviatrice mondialement connue).
Jean Batten ? A vrai dire, je n'en avais jamais entendu parler avant de m'installer à Auckland début novembre 2016 mais je me rattrape depuis car elle n'arrête pas de se manifester, dans différents contextes :
1 - D'abord au terminal international de l'aéroport qui porte son nom,
2 - ensuite lors du Auckland free Walking tour qui passait par la place portant son nom au pied d'un immeuble où elle a vécu, le guide nous a parlé de cette conquérante du ciel qui fait la fierté du pays,
3 - enfin, c'est moins "glamour", lors de la visite du Howick Historical Village qui présente des toilettes ayant appartenu à sa famille (oui, les toilettes, la petite cabine en bois qu'on plaçait autrefois au fond des jardins) ... mais ça prouve bien que quand on a une héroïne nationale on essaye de s'en approprier un bout quitte à la caser à n'importe qu'elle sauce ...


©SM


Quant à la balustrade surplombant le hall des arrivées, elle présente une sorte de frise chronologique sur la vie, les exploits et les caractéristiques de l'avion le plus important pour les conquêtes de Jean Batten.
C'est une sorte de jeu de piste éducatif dans l'aéroport, pas mal fait et dont l'idée est plutôt bonne, à deux réserves près :
- le manque de lisibilité des informations placées sur les vitres, 
- leur accessibilité restrainte du fait des tables du food-court qui s'y collent,
avec au final,
peu d'adeptes à ce petit jeu,
on ne vient pas à l'aéroport pour ça !



Il n'en reste pas moins que Jean Batten est une icône nationale, une femme qui a su se faire une place dans un monde d'hommes en battant ou en établissant de nombreux records de vols faisant d'elle une personnalité mondialement connue des années 1930 et à la suite desquels elle a reçu moultes distinctions honorifiques.

Statue de Jean Batten - Aéroport d'Auckland - ©SM

À son actif :

- En 1934 : vol en solo de l'Angleterre à l'Australie en 14 jours et 22 heures avec un Gipsy Moth (elle bat de plus de 4 jours le précédent record détenu par Amy Johnson, une aviatrice anglaise)

- En 1935 : vol Australie- Angleterre en 17 jours, première femme à effectuer ce "vol retour".

- En 1935 : record du monde Angleterre-Brésil, Jean Batten parcoure 5'000 miles en 61 heures avec le Percival Gull. Cet exploit établi également le record de vitesse de la traversée de l'Atlantique sud et permet d'inscrire la première femme à la liste des pilotes ayant réalisé la liaison aérienne Anleterre-Amérique du sud. Pour cette performance, elle est honorée de l'Ordre national de la Croix du Sud, première personne autre qu'un membre de la famille royale à être ainsi distinguée.

- En 1936 : elle est le tout premier pilote à avoir effectué le vol solo direct Angleterre-Nouvelle-Zélande (Auckland) soit 14'224 miles en 11 jours et 43 minutes avec son Percival Gull. C'est sans doute l'exploit qui reste le plus connu et le plus cher au coeur des néo-zélandais. Au passage, ce vol permis d'établir un nouveau record de vitesse pour la traversée Australie-Nouvelle-Zélande en 10 heures 30 minutes.
Son exploit fut honoré par les Maori de Roturoa, sa ville natale : ils lui donnèrent le nom d'Hine-o-te-Rangi (Fille du ciel) et lui offrirent une cape de plumes de chef. Elle fut également nommée Commandeur de l'ordre de l'Empire Britannique (CBE) et reçu la croix de chevalier de la Légion d'honneur française.

- En 1938, elle est la première femme à recevoir la médaille de la Fédération aéronatique internationale, la plus haute distinction de l'aviation.

Timbre de 1990, série "heritage"/"achievers" émise pour les 150 ans de la Nouvelle-Zélande
Toujours encouragée et soutenue par sa mère, Jean Batten était une femme douée, engagée, passionnée et volontaire qui a marqué son époque et l'histoire de l'aviation jusqu'à ce que la deuxième guerre mondiale change la donne et mette un terme à l'époque des pionniers du ciel.
Surnommée la "Garbo du ciel" par Ian Mackersey dans la biographie qu'il lui consacre, sa vie ferait un formidable roman balisé par les deux guerres mondiales, marqué par l'aventure et les voyages avec un volet amoureux jalonné de fiançailles mais jamais de mariage, une séductrice qui utilisait ses conquêtes pour servir ses desseins et obtenir le financement de ses cours de pilotage et de ses avions ... une pionnière du sponsoring aussi qui après la célébrité et la mort de sa mère en 1966, connu une fin de vie solitaire et une mort tragique, inhumée dans l'anonymat le plus complet au coeur d'une fosse commune des Baléares où elle repose.

Cette héroïne nationale a contribué à placer la Nouvelle-Zélande sur la carte du monde à son époque mais elle pourrait aussi illustrer le côté progressiste de son pays où les pionnières ont su très tôt s'imposer, se faire entendre et prendre leur place (la Nouvelle-Zélande est par exemple le premier pays à avoir accordé le droit de vote aux femmes, dès 1893)...

... Bref, une sacrée nana sur laquelle l'avion pendu de l'aéroport d'Auckland cherche à attirer l'attention et rappeler les exploits malgré l'indifférence ambiante ! 

15 septembre 2016 - Doodle Google pour le 107ème anniversaire de Jean Batten
Nota :
Le livre My Life de Jean Batten, publié en 1938 chez George G. Harrap & Company Limited est disponible en anglais, en version digitale sur le site de l'université Victoria de Wellington. Un témoignage accessible et une narration linéaire assez factuelle évoquant notamment les conditions des vols qui suivaient des  repères terrestres, passaient par l'enregistrement dans des stations de l'empire britannique, le tout avec des instruments et des moyens relativement rudimentaires.

Aujourd'hui dans mon petit lexique Maori - Français :
Hine : fille
Rangi : ciel, jour

Sources et plus d'infos :
Biographie Jean Batten - Te Ara - ICI
My Life de Jean Batten - Version digitale - Victoria University of Wellington - ICI
Jean Batten, "la fille du ciel" - page 114 / Portraits légendaires d'aviateurs, Hervé Gouinguenet ICI
Jean Batten Doodle - ICI

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